Culture et transition écologique : éveiller les consciences, susciter les engagements et transformer la société.

 
 

À l’occasion de la COP26, le Campus de la transition écologique participait hier au forum international Culture et environnement, vers une alliance durable, organisé par Culture Montréal. L’événement a valorisé la contribution de la culture à la transition écologique et mobilisé les acteurs culturels et environnementaux autour de cet enjeu incontournable. Alors que plusieurs d’entre-nous nous questionnons sur les moyens à prendre pour assurer une plus grande mobilisation des individus, mais également assurer des engagements de la part des entreprises et des gouvernements à la hauteur de l’ampleur de la crise, il nous apparaît essentiel de reconnaître le rôle et le pouvoir incontournables des artistes et de la culture pour transformer la société, éveiller les consciences et susciter engagements et actions. Auprès d’organisations culturelles et environnementales, le Campus s’est engagé à soutenir leurs rôles et leurs contributions dans l’accélération d’une transition écologique juste et inclusive.

Il nous semble important de partager les réflexions qui nous ont mené à ce parti-pris et de l’ancrer de manière plus large et cohérente avec nos principes et nos programmes. 

De tous temps, les artistes ont crée dans leurs pratiques individuelles des oeuvres engagées qui parfois nous bousculent, nous font voir les réalités qui nous entourent sous d’autres regards, touchent intimement notre humanité et nous révèlent à nous-même, remettent en question nos aprioris dans notre rapport aux autres ou à la nature. Maîtres de l’imaginaire, ils font preuve de prescience en voyant ce qui peut être invisible à nos yeux. Ils sont souvent un pas en avant de la parade et nous montrent le chemin vers un futur inconnu, qu’ils dessinent. Par ailleurs, le milieu culturel montréalais a exprimé à diverses occasions son désir de s’engager plus formellement dans le mouvement de la transition écologique. La constitution hier de la commission permanente culture et transition écologique Culture Montréal, pour laquelle le Campus assumera la vice-présidence, témoigne de ce mouvement réjouissant.

Parallèlement, forts d’énormes avancées dans la conscientisation et la mobilisation de la population, certains acteurs du milieu environnemental et scientifique constatent néanmoins les limites actuelles d’un discours axé uniquement sur la science et les données. Dans les six derniers mois, quelques événements illustrent ces réflexions: des scientifiques membres du GIEC et des militants internationaux appelant à une révolution par la poésie et les arts¹; le David Suzuki Institute et son Climate Emergency Unit initiant le mouvement canadien SCALE (Sectoral Climate Arts Leadership for the Emergency); tandis qu’à Montréal, le CRE annonçait hier un nouveau prix Phénix, coup de coeur Culture et transition écologique.

Persuadés de leur pouvoir transformationnel et de leur impact pour instiller un mouvement menant à des changements de comportement, nous croyons résolument à la pertinence d’intégrer formellement les arts et la culture dans notre axe Sensibilisation. À terme, que ce soit par l'octroi de bourses de recherche et création, par l’accueil in situ de propositions artistiques permettant de vivre des émotions qui reconnectent à la nature ou par la création et la production de contenus de type documentaires, nos actions s’inscrivent vers la mise en place de ce que nous appelons pour le moment, le Studio de création.

Nous aspirons par ailleurs à intégrer la culture dans notre axe Recherche pour entre autres documenter ses impacts et ses approches, ainsi qu’à y faire une place de choix au sein même de notre gouvernance et organisation. Le décision de faire appel aux artistes d’Eltoro pour élaborer notre identité visuelle s’ancre dans cette approche et nous a mené vers un univers onirique où le rapport d’interdépendance entre les humains et le vivant est illustré par des animaux et des plantes plus grands que nature. Cette audace, et l’accueil d’un certain inconfort initialement ressenti face à une création qui s’éloignait des récits généralement associés à la transition, est au coeur de nos principes d’actions. Cette place accordée à la culture se veut aussi en cohérence avec nos autres principes. Pensons à la diversité des voix et des savoirs qui s’incarne autant par la singularité des oeuvres et de la création que par la puissance de la culture pour rejoindre une multitude de publics, notamment les populations plus marginalisées ou moins conscientisées. Nous espérons également que les oeuvres soutenues puissent essaimer à la grandeur du Québec, ce qui s’inscrit dans une vision de réciprocité. Enfin, après un été passé dans les jardins de la Grande poudrière ou le théâtre de la Poudrière diffusait de 1957 à 1983 des pièces de théâtre dans leur langue d’origine, c’est également un clin d’oeil à sa fondatrice Jeannine Beaubien et à la présence de la culture au parc Jean-Drapeau.

Face à un monde ou la complexité des systèmes, des problématiques et des relations s'accroît, les arts et la culture peuvent contribuer de façon unique et significative à l’accélération et à la réussite de la transition².

Que ce soit en éveillant les consciences, en suscitant une émotion ou une expérience qui nous rapproche du vivant, en tissant des liens entre les individus, en bâtissant des communautés plus résilientes habitées par des personnes engagées ou en nous amenant à réfléchir autrement et à trouver les solutions de demain par des processus qui leurs sont propres, les artistes doivent être parties prenantes de nos actions et réflexions futures. Et nous entendons être là, avec nos partenaires, pour participer à ce momentum et, à notre échelle, amplifier leur voix et leurs contributions!

Emmanuelle Hébert, directrice des partenariats et du développement - Campus de la transition écologique.


¹ The Climate Reality Project, Climate Reality Leadership Course, 16-17 octobre 2021.

² Lire David Maggs, Art and the World After This, juin 2021, Metcalfe Foundation

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